Alors que l’œuvre de Sono Sion est de plus en plus reconnue et diffusée dans le monde (son dernier film Himizu a été primé à la Mostra de Venise tandis que Cold Fish et Guilty of Romance ont au moins été projeté dans plusieurs salles françaises), il est également de plus en plus aisé de visionner les premiers films du réalisateur nippon. Il y a encore quelques mois, il était mission impossible pour un occidental de voir les films de Sono Sion sortis avant Suicide Club, en 2001. Ce qui constitue tout de même six courts métrages et quatre longs métrages (disponibles dans le coffret DVD "Sono Sion Early Works Before Suicide") ! On a déjà chroniqué ici The Room et I Am Keiko. Avant de s'attaquer à son premier long métrage, Bicycle Sighs, c'est le tour d'Utsushimi.
Dans un entretien réalisé en février 2010, Sono Sion évoquait ce film, "un semi-documentaire sur la pratique photographique d'Araki et en même temps une fiction érotique et dramatique". Utsushimi est en effet un film un peu bâtard entre la fiction et le documentaire. Le film est présenté comme "un film sur le corps humain", tourné au début de l'année 1999.
L'aspect documentaire, d'abord. Sono Sion filme le travail de trois personnalités : le célèbre photographe érotomane Noboyushi Araki, le danseur de butoh Akaji Maro et le couturier Shinichiro Arakawa. A vrai dire, Sono Sion filme surtout une séance photo d'Araki, au cour de laquelle il photographie une dizaine de femmes nues, le tout, sans censure pixelisée. Araki est un peu excité, il transpire, il shoote frénétiquement. Une impulsivité qui tranche avec la retenue des cours de danse d'Akaji Maro et la médiation des créations de vêtements de Shiniricho Arakawa. Pour l'anecdote, notons qu'Akaji Maro apparaît dans d'autres films de Sono Sion, dont The Room et Suicide Club, mais également dans des films de Takashi Miike et Shinya Tsukamoto !
L'aspect "documentaire ses les tournages du film", ensuite. Comme pour marquer une transition entre le documentaire et la fiction, Sono Sion se met en scène, lui et son équipe, lors des répétitions d'Utsushimi. Avec beaucoup d’auto-dérision, Sono Sion met en scène une équipe fatiguée qui répète dans une tension palpable, jusqu'au départ du directeur de photographie qui part sans laisser de trace, après avoir divorcé de sa femme - qui participe évidemment aussi au tournage du film ! Un passage assez comique.
La fiction, enfin. Sono Sion reste dans le comique - même dans la potacherie. Délibérément filmé de manière approximative et je-m'en-foutiste (la perche du preneur de son ostensiblement visible sur plusieurs plans, des moitiés de corps de membres de l'équipe apparaissent de ci de là, etc...), Utsushimi tranche avec l'esthétisme sobre de The Room et le minimalisme d'I Am Keiko. Loin d'être sobre, le film ressemble plutôt à un film de fin d'année d'étudiants bourrés ! C'est comique, un peu bête, parfois grotesque, comme cette scène où les deux personnages principaux sont munis de sexes géants et courent en pleine rue. L'histoire est somme toute assez simple : une lycéenne décide de perdre sa virginité avec un cuisinier dont elle est amoureuse. S'ensuivent quelques marivauderies classiques.
Œuvre très barrée, Utsushimi n'atteint pas les sommets mais comportent de bonnes scènes, notamment le shooting d'Araki, les coulisses du film et la scène d'amour entre les deux personnages principaux. Le reste est ultra-potache. Utsushimi n'est donc pas destiné à tous les publics !
1 commentaire:
"disponibles dans le coffret DVD "Sono Sion Early Works Before Suicide"
Ce coffret n'existe pas, c'est un lot de film dont les droits sont mis en vente (et qui n'a pour l'heure tjs pas trouvé d'acheteur) .. les films dispo sont issues du fansub des sorties officielles JP.
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