dimanche 18 janvier 2009

Abel Bonnard et l'argent

Abel-Bonnard
Abel Bonnard (1883-1968) est un écrivain peu connu aujourd'hui bien qu'il fut académicien. Mais bien peu d'académiciens demeurent immortels dans la mémoire des hommes. Abel Bonnard est surtout connu pour ses activités politiques. Maurassien, antiparlementariste, antisémite, adhérent au Parti Populaire Français de Jacques Doriot, Bonnard fut ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse entre 1942 et 1944. A cette époque, il écrit dans Je Suis Partout. Après un passage à Sigmaringen en 1944 (lire D'un château l'autre de Céline pour plus de renseignements sur cette période drolatique de la politique française), Bonnard se réfugie en Espagne où il passe un an dans les prisons de Franco avant d'obtenir l'asile politique. En France, le Comité National des Ecrivains s'occupe de son cas. Condamné à mort par contumace le 4 juillet 1945, sa condamnation à la dégradation nationale entraîne de facto son exclusion de l'Académie française. En1960, il revient en France, est rejugé et condamné à dix ans ans de bannissement avec effet à partir de 1945. La peine était donc symbolique et déjà purgée mais, n'acceptant pas cette « flétrissure morale », Abel Bonnard préfère retourner en Espagne où il meurt en 1968.

On compte parmi ses oeuvres Notes de voyage: en Chine (1920-1921), Éloge de l'ignorance, La Vie amoureuse d'Henri Beyle, Les Modérés et Pensées dans l'action. En 1928, il publie L'Argent, recueil d'aphorismes et de réflexions dont voici des extraits. Ce livre fait partie d'une collection de notes et maximes éditée par Hachette au milieu des années 1920. Cette collection comprend La Mode par Francis de Miomandre, La Conversation par André Maurois, Le Voyage par Paul Morand ou Le Sport par Jean Giraudoux.

Abel-Bonnard-Argent
Le monde moderne est le monde de l’argent : c’est la plus brève façon de dire qu’il n’a plus d’âme.

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L’argent ne doit être que le plus puissant de nos esclaves.

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Il y a des riches qui ne nous montrent qu’un homme au service de l’argent et d’autres qui nous montrent l’argent au service d’un homme.

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L’argent traversait l’ancienne société comme un fleuve dans un pays qu’il arrose : aujourd’hui le fleuve s’est débordé, et plus d’une vieille vertu roule noyée dans ses ondes. Il est aussi naturel de désirer l’argent pour ce qu’on en fera, qu’il est horrible de le désirer pour ne rien en faire.

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Il y a des gens qui dépensent si joliment leur argent qu’on souhaite qu’ils en aient toujours.

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Le plaisir d’un riche qui fait son testament n’est pas de penser à ceux qu’il enrichira, mais à ceux qu’il frustre.

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Dépenser est un plaisir de poète.

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Il faudrait que, de temps en temps, un poète eût une fortune à dépenser, pour montrer aux riches ce qu’on peut faire avec de l’argent.

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Il n’y a guère que les poètes et les femmes pour savoir traiter l’argent comme il le mérite.

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On voudrait être assez riche pour ne plus penser à l’argent, mais la plupart des hommes ne le sont que pour y penser davantage.

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