Suite et fin des pérégrinations de Robert Florey au Japon, publiées le 1er décembre 1922 dans Cinémagazine (première partie ici).
D'un commun accord, nous acceptâmes Ivano et moi, et nous trouvâmes un peu plus tard au Shochiku Studio dont l'entrée principale me rappela immédiatement celle des Metro Studios à Hollywood. Coquets jardinets et pelouses bien entretenues (les Japonais sont des jardiniers experts) précèdent la grande entrée. Tous les bureaux sont meublés à l'américaine. Une téléphoniste assise devant un bureau distributeur, reçoit les visiteurs, et annonce leur présence, par téléphone, au directeur du département désiré. Une large avenue empierrée traverse perpendiculairement la cour centrale du studio. Quatre grands studios de verre composent le Shochiku Studio. Sur les terrains en plein air, des décors représentant des maisons et des rues européennes ou japonaises, s'élèvent. Le matériel employé est tout à fait moderne : éclairage électrique au "Cooper-Hewitt", appareils de prise de vues "Bell and Howell", "Debrie", "Pathé" et "Erneman". Les stars du studio sont habillées soit à l'européenne soit à la mode ancienne japonaise. Cependant, ils nu'sent pas de masques et indiquent leurs divers états d'âme par des jeux de physionomie comme nos artistes. Ils emploient également un maquillage semblable à celui des artistes de Los Angeles, ce qui m'a surpris passablement.
- Les films que nous produisons - m'expliqua Kotani - sont tout à fait modernes, et leurs scénarios se basent généralement sur des romans héroïques, des histoires d'amour ou des aventures japonaises. Nous produisons également des films d'après les œuvres d'écrivains modernes, ainsi que des comédies ou des films comiques. Notre principale spécialité est le drame.
Henry Kotani nous fit ensuite visiter les ateliers, les départements des scénarios, les laboratoires, les ateliers des accessoiristes, qui peuvent rivaliser avec les meilleurs des studios américains. La plupart des cameramen sont des étrangers, deux sont américains, un allemand et un autre anglais.
Notre aimable cicerone nous donna ensuite une lettre d'introduction pour la Tokio International Film Co. dont son ami Harry Ushiyama est l'un des managers. Les sutdios de l'International Film sont à peu près semblables à ceux de la Shochiku. Nous eûmes la chance de voir tourner dans plusieurs scènes les stars favoris du public japonais dont Miss Chitose Hayashi qui devint artiste de cinéma après avoir travaillé à l'Université Impériale de Tokio, Koichi Katsuyari connu à l'écran sous le nom de Koichi Seki, qui est le jeune premier de la Tokio International, Miss Harue Koike, autre star qui est la Mary Pickford japonaise, Miss Shotaro Hanayagi, fameuse vamp, etc...
Nous passâmes notre première soirée dans un des cinémas de notre ami Tanaka, qui donnait justement Mr Fix-It de Douglas Fairbanks et Tanaka nous confia que le public japonais appréciait de plus en plus les productions étrangères, ce qui ne tarderait pas à amener un jour la mort du cinéma japonais...
- Je fais plus de recette avec Tom Mix ou Pina Menichelli qu'avec un film interprété par Koichi Seki et Harue Koike nous confia-t-il.
"Nous passons également beaucoup de films Gaumont ou des productions italiennes ou allemandes ; mais les spectateurs aiment particulièrement les films américains. Sessue Hayakawa ne jouit pas ici d'une grande popularité car il a interprété plusieurs fois des films montrant le peuple japonais sous un mauvais côté. Ici on ne lui a pas pardonné Forfaiture [film de Cecil B. de Mille sorti en 1915] et lors de son récent voyage on lui a même reproché de tourner ce film... Malgré tout, le public lui a fait, ainsi qu'à Tsuru Aoki, un très chaleureux accueil."
Le prix des places dans les cinémas est très différent. Vous payez quelquefois plus cher, pour voir une demi-heure de spectacle dans un petit cinéma que pour voir cinq ou six heures de spectacle dans un grand cinéma populaire... C'est très curieux.
Il existe à Tokio une centaine de journaux magazines traitant dxe l'industrie cinématographique, mais presque tous sont remplis par des annonces de publicité américaine.
Le lendemain, nous visitâmes une de ces installations en plein air dont nous avait parlé notre ami Kotani.
Nous fûmes très déçus par le spectacle que nous vîmes. Le film était interprété par l'étoile Fukusuke Nakamura, et elle était la seule de la troupe qui n'usait pas du système japonais. Son partenaire changeait toujours de masque, et il était coiffé d'un chapeau melon ridicule (je n'ai jamais compris pourquoi). Un gigantesque samouraï le poursuivait partout. On nous expliqua qu'il s'agissait d'un film comique en "deux réels" [deux bobines]...
Huit jours plus tard, nous quittions Tokio et nous nous embarquions pour Honolulu... Dans cette île charmante, il n'y a pas de studio, c'est pourquoi je ne vous parlerai pas aujourd'hui des Îles Hawaï.
D'un commun accord, nous acceptâmes Ivano et moi, et nous trouvâmes un peu plus tard au Shochiku Studio dont l'entrée principale me rappela immédiatement celle des Metro Studios à Hollywood. Coquets jardinets et pelouses bien entretenues (les Japonais sont des jardiniers experts) précèdent la grande entrée. Tous les bureaux sont meublés à l'américaine. Une téléphoniste assise devant un bureau distributeur, reçoit les visiteurs, et annonce leur présence, par téléphone, au directeur du département désiré. Une large avenue empierrée traverse perpendiculairement la cour centrale du studio. Quatre grands studios de verre composent le Shochiku Studio. Sur les terrains en plein air, des décors représentant des maisons et des rues européennes ou japonaises, s'élèvent. Le matériel employé est tout à fait moderne : éclairage électrique au "Cooper-Hewitt", appareils de prise de vues "Bell and Howell", "Debrie", "Pathé" et "Erneman". Les stars du studio sont habillées soit à l'européenne soit à la mode ancienne japonaise. Cependant, ils nu'sent pas de masques et indiquent leurs divers états d'âme par des jeux de physionomie comme nos artistes. Ils emploient également un maquillage semblable à celui des artistes de Los Angeles, ce qui m'a surpris passablement.
- Les films que nous produisons - m'expliqua Kotani - sont tout à fait modernes, et leurs scénarios se basent généralement sur des romans héroïques, des histoires d'amour ou des aventures japonaises. Nous produisons également des films d'après les œuvres d'écrivains modernes, ainsi que des comédies ou des films comiques. Notre principale spécialité est le drame.
Henry Kotani nous fit ensuite visiter les ateliers, les départements des scénarios, les laboratoires, les ateliers des accessoiristes, qui peuvent rivaliser avec les meilleurs des studios américains. La plupart des cameramen sont des étrangers, deux sont américains, un allemand et un autre anglais.
Notre aimable cicerone nous donna ensuite une lettre d'introduction pour la Tokio International Film Co. dont son ami Harry Ushiyama est l'un des managers. Les sutdios de l'International Film sont à peu près semblables à ceux de la Shochiku. Nous eûmes la chance de voir tourner dans plusieurs scènes les stars favoris du public japonais dont Miss Chitose Hayashi qui devint artiste de cinéma après avoir travaillé à l'Université Impériale de Tokio, Koichi Katsuyari connu à l'écran sous le nom de Koichi Seki, qui est le jeune premier de la Tokio International, Miss Harue Koike, autre star qui est la Mary Pickford japonaise, Miss Shotaro Hanayagi, fameuse vamp, etc...
Nous passâmes notre première soirée dans un des cinémas de notre ami Tanaka, qui donnait justement Mr Fix-It de Douglas Fairbanks et Tanaka nous confia que le public japonais appréciait de plus en plus les productions étrangères, ce qui ne tarderait pas à amener un jour la mort du cinéma japonais...
- Je fais plus de recette avec Tom Mix ou Pina Menichelli qu'avec un film interprété par Koichi Seki et Harue Koike nous confia-t-il.
"Nous passons également beaucoup de films Gaumont ou des productions italiennes ou allemandes ; mais les spectateurs aiment particulièrement les films américains. Sessue Hayakawa ne jouit pas ici d'une grande popularité car il a interprété plusieurs fois des films montrant le peuple japonais sous un mauvais côté. Ici on ne lui a pas pardonné Forfaiture [film de Cecil B. de Mille sorti en 1915] et lors de son récent voyage on lui a même reproché de tourner ce film... Malgré tout, le public lui a fait, ainsi qu'à Tsuru Aoki, un très chaleureux accueil."
Le prix des places dans les cinémas est très différent. Vous payez quelquefois plus cher, pour voir une demi-heure de spectacle dans un petit cinéma que pour voir cinq ou six heures de spectacle dans un grand cinéma populaire... C'est très curieux.
Il existe à Tokio une centaine de journaux magazines traitant dxe l'industrie cinématographique, mais presque tous sont remplis par des annonces de publicité américaine.
Le lendemain, nous visitâmes une de ces installations en plein air dont nous avait parlé notre ami Kotani.
Nous fûmes très déçus par le spectacle que nous vîmes. Le film était interprété par l'étoile Fukusuke Nakamura, et elle était la seule de la troupe qui n'usait pas du système japonais. Son partenaire changeait toujours de masque, et il était coiffé d'un chapeau melon ridicule (je n'ai jamais compris pourquoi). Un gigantesque samouraï le poursuivait partout. On nous expliqua qu'il s'agissait d'un film comique en "deux réels" [deux bobines]...
Huit jours plus tard, nous quittions Tokio et nous nous embarquions pour Honolulu... Dans cette île charmante, il n'y a pas de studio, c'est pourquoi je ne vous parlerai pas aujourd'hui des Îles Hawaï.